Coup de canif dans la contractualisation : la Mutualité voit rouge

27 juin 2011

Les sénateurs ont supprimé l’article 22 d’une proposition de loi portant modification de la loi n°2009-879 du 21 juillet 2009, dite Loi HPST. Un article adopté pourtant par l’Assemblée nationale, et qui rendait aux mutuelles le droit de passer contrat avec des professionnels de santé. Aux yeux d’Etienne Caniard, président de la Mutualité française, cette décision est « incompréhensible ». Du coup, la principale organisation mutualiste de France – 18 millions d’adhérents – annonce qu’elle se retire des négociations portant sur la nouvelle convention nationale des médecins libéraux. Un sacré coup de tonnerre !

Qu’est-ce que la contractualisation ? Grâce à ce fameux article 22, dit loi Fourcade, les mutuelles auraient eu le droit de nouer des relations contractuelles avec différents professionnels de santé, individuellement ou dans le cadre de réseaux. En clair, elles auraient pu offrir à leurs adhérents la possibilité d’être mieux remboursés s’ils consultaient des professionnels ‘sous contrat’, que des professionnels ‘hors contrat’.

Le libellé de cette proposition, avait le mérite de la clarté : « Les mutuelles ou unions peuvent toutefois instaurer des différences dans le niveau des prestations lorsque l’assuré choisit de recourir à un professionnel de santé, un établissement de santé ou un service de santé membre d’un réseau de soins ou avec lequel les mutuelles, unions ou fédérations ont conclu un contrat comportant des obligations en matière d’offre de soins. » Ce texte permettait notamment, de rendre obsolète une récente jurisprudence de la Cour de Cassation , qui avait condamné le Mutuelle générale de l’Education nationale (MGEN) pour avoir instauré des différences dans le niveau des prestations servies à ses adhérents.

« C’est d’autant plus incompréhensible que le principe de la contractualisation avait été reconnu par la Cour des Comptes, par le gouvernement, et par l’Assemblée nationale », s’insurge Etienne Caniard. « Face aux dérives que l’on constate en matière de dépassements d’honoraires, les mutuelles tiennent à défendre le droit de leurs adhérents à bénéficier, lorsqu’ils en font le choix, de soins de qualité avec des restes à charge maîtrisés. », insiste t-il.

Quelles conséquences pratiques ? Selon Etienne Caniard, le rejet du Sénat risque de compromettre l’égalité dans l’accès aux soins. « A terme, des patients qui font confiance à leur (assurance) complémentaire, ne pourront pas bénéficier d’une meilleure prise en charge de leurs soins ». Le conflit est donc frontal. Alors que pour la première fois la négociation conventionnelle s’engageait sur une base tripartite – organismes de sécurité sociale, organismes d’assurance maladie complémentaire et professionnels – elle paraît compromise.

« En accord avec ses partenaires de l’Union nationale des Organismes d’Assurance-maladie complémentaire</em » la Mutualité se retire en effet « dès à présent de la négociation » conventionnelle. Celle-ci paraît donc compromise, alors même que les trois parties semblaient fonder de grands espoirs sur la mise en œuvre d’un « secteur optionnel » grâce auquel le problème des dépassements d’honoraires aurait été convenablement géré.

Pour aller plus loin :
– Accès au texte intégral de la loi n°2009-879 du 21 juillet 2009, ou loi HPST

Accès à la proposition de loi rectificative (voir article 22)

  • Source : Mutualité française, 23 juin 2011 – Interview d’Etienne Caniard, Président de la Mutualité française, 24 juin 2011

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