Des pharmacies DocMorris ? La Cour de Justice européenne dit « Non »

16 décembre 2008

Oui ou non, le principe de libre installation professionnelle et de libre circulation des capitaux à l’intérieur de l’espace européen commande-t-il que tout un chacun puisse demain devenir propriétaire d’une (ou plusieurs) officines pharmaceutiques ?

En d’autres termes, des sociétés purement capitalistes qui ne seraient pas détenues par des pharmaciens doivent-elles se trouver autorisées à créer des réseaux d’officines, éventuellement en contradiction avec les lois nationales des Etats-membres ? L’avocat général près la Cour de Justice des Communautés européennes Yves Bot, vient de répondre par la négative. Sans ambigüité, affirmant que la pharmacie doit rester le métier du… pharmacien !

Rejetant comme non fondé un recours de la Commission contre la République italienne, il estime en effet « que l’impossibilité pour les entreprises de distribution de produits pharmaceutiques de prendre des participations dans les sociétés de gestion de pharmacies communales est justifiée au regard de l’objectif visant à garantir un niveau élevé de protection de la santé publique. » Il précise également dans ses conclusions rendues aujourd’hui à Luxembourg, que cette interdiction « offre une garantie supplémentaire qui permet d’éviter (…) les risques de conflits d’intérêts qui pourraient naître de la participation de cette catégorie d’opérateurs économiques à la gestion des pharmacies communales. »

Il ressort de cette conclusion, que le médicament n’est pas considéré par la Cour comme une denrée commerciale tout-à-fait ordinaire. Cette notion quoi qu’on en dise, méritait sans doute d’être rappelée. Ce même jour à Luxembourg, une autre affaire opposait la chambre des pharmaciens de la Sarre en Allemagne, au ministère de la Santé de ce Land, qui avait autorisé l’ouverture d’une succursale de la société anonyme de vente par correspondance de médicaments DocMorris NV, d’origine néerlandaise.

Il s’agissait là encore de dire si le droit communautaire permettait à une société purement commerciale, sans attaches pharmaceutiques, de s’établir pour vendre des médicaments. Là encore l’avocat général a excipé de l’exception pharmaceutique. Considérant que « dans la mesure où les médicaments (…) peuvent, en cas de mauvaise utilisation, entraîner la mort de leurs consommateurs, (…) leur délivrance doit être entourée de garanties particulières. Ainsi, il nous paraît légitime qu’un Etat Membre souhaite atteindre un niveau élevé de protection de la santé publique en tentant de préserver la qualité et la neutralité de l’acte de dispensation des médicaments. » D’où il ressort que « les articles 43 CE et 48 CE (…) ne s’opposent pas à une législation nationale en vertu de laquelle seuls des pharmaciens peuvent détenir et exploiter une pharmacie. »

  • Source : Cour de Justice des Communautés européennes, 16 décembre 2008

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