Du tabac sans fumée ? Fumeux…

21 février 2011

Le snus suédois est-il un moyen de réduire les risques liés au tabagisme, ou au contraire une stratégie de rechange pour des industriels en mal de promotion pour leurs produits ? Selon le Pr Bertrand Dautzenberg, président de l’Office français contre le Tabagisme (OFT), la deuxième option est – malheureusement – la bonne…

En France, nous connaissons bien la cigarette… mais beaucoup moins le snus. D’origine suédoise, ce produit est l’un des nombreux avatars du tabac sans fumée, au même titre que le betel par exemple. Parfois désigné comme tabac à chiquer ou à priser, il ne se mâche pas et se place simplement sous la lèvre, contre la gencive. Mais il s’agit bien de tabac sous une forme sèche et broyée, en mélange avec des substances aromatiques, des sels, de l’eau et des agents humidifiant… En 2009, selon l’Institut national de Santé publique suédois, le snus était consommé par 19% des hommes et 4% des femmes de ce pays.

Pour…

Son niveau de consommation en France, n’est pas clairement établi. C’est d’autant plus difficile que l’Union européenne a interdit sa commercialisation en 1992, hors du territoire suédois. D’après Raoul Harf, pneumologue au CHU de Lyon, « le snus ne pose pas de problèmes à type de maladies cardio-vasculaires ou de cancers. Il n’entraîne pas de transfert vers la cigarette, et, par rapport à celle-ci, il diminue le risque de morbi-mortalité. Le problème avec le tabac, c’est de le fumer. »

… et contre

Ces affirmations font bondir le Pr Dautzenberg. « Le snus suédois est moins dangereux, mais il en existe aussi des versions américaines (Philip Morris ou Camel en proposent parmi leurs produits) qui augmentent les risques cardiovasculaires et de cancers », explique t-il. « De plus, il est souvent présenté comme une stratégie pour arrêter de fumer, mais aucun essai n’a démontré son efficacité à cet égard. Et surtout, il est considéré comme un tabac ‘sain’ pour promouvoir l’ensemble des produits du tabac. Une stratégie éculée des industriels… »

Si les résultats d’études portant sur les maladies cardiovasculaires ou les cancers sont contradictoires, d’autres pourtant vont toutes dans le même sens. Tout d’abord, les enfants de femmes ayant consommé du snus pendant leur grossesse présentent un plus faible poids à la naissance. Ensuite, il est incontestable que le snus entraîne une dépendance. Et pour le Pr Dautzenberg, la messe est alors dite : « quel est l’intérêt d’être dépendant à un produit, même dans le cas – non prouvé en l’occurrence – où celui-ci ne serait pas mauvais pour la santé ? » En effet, on peut se poser la question…

Que dit l’OMS?

En 2006, à l’occasion de la Journée mondiale sans tabac, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) faisait déjà remarquer que le tabac est « mortel sous toutes ses formes ». Elle invitait « les gouvernements à élargir leur action antitabac face à la prolifération rapide d’une variété croissante de produits du tabac fumés ou sans fumée »,. Elle soulignait que le snus « auparavant apprécié dans un nombre limité de pays, fait l’objet d’une commercialisation intensive dans d’autres régions du monde ».

Pour en savoir plus, lisez les dossiers de l’OMS sur « Le tabac: mortel sous toutes ses formes » et ses recommandations sur les produits du tabac sans fumée.

  • Source : Congrès de Pneumologie de Langue française, 28 janvier 2011, Lille – site de l'OMS consulté le 16 janvier 2011 – site du Swedish National Institute of Public Health, consulté le 16 janvier 2011.

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