Grippe A/H1N1 : Le Comité d’urgence de l’OMS (enfin) dévoilé

11 août 2010

Après avoir sonné hier la fin de la pandémie grippale A/H1N1, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) vient de rendre publique la composition de son Comité d’urgence. Elle avait jusqu’ici préféré préserver l’anonymat de ses membres pour « les protéger d’influences commerciales ou autres », selon la Directrice générale, le Dr Margaret Chan. Mais à l’échelle internationale, cette stratégie a surtout été assimilée à un manque de transparence.

Une structure consultative. Pour rappel, ce Comité d’urgence a été mis en place par la Directrice générale de l’OMS dès la fin du mois d’avril 2009. Il s’agissait d’une structure consultative sur laquelle la Direction générale de l’OMS s’appuyait avant de prendre des décisions concernant la pandémie (passage d’une phase à une autre, recommandations concernant les voyages internationaux, stratégie vaccinale…).

Aucun Français. Australie (1 membre), Canada (2), Chili (1), Chine (1), Etats-Unis (2), Ghana (1), Japon (1), Mexique (1), Pakistan (1), Royaume-Uni (2), Sénégal (1) et Thaïlande (1) : le Comité d’urgence de l’OMS concernant la pandémie grippale était composé de 15 membres. Auxquels il convient d’ajouter un « conseiller », en l’occurrence le Pr Neil Ferguson de Londres.

Cette liste correspond légitimement à un assemblage de compétences : en virologie, en épidémiologie, en biologie, en infectiologie et même en… aéronautique et en transport. Ce qui peut sans doute se justifier étant donné l’importance des transports aériens dans la propagation d’une pandémie.

Sur les 16 membres, 15 sont médecins ou bénéficient du titre de « professeur ». Quant au Sénégalais André Basse, il est présenté par l’OMS comme « conseiller ». Il travaillerait actuellement au sein de l’ambassade du Sénégal à Paris.

L’on y recense toutefois « beaucoup de compétences en matière de grippe », assure le Pr Bruno Lina, Directeur du Centre national de référence de la grippe à Lyon. Lequel cite notamment le Dr Nancy Cox des CDC d’Atlanta, le Pr Maria Zambon et le Dr John Wood de Londres et encore le Pr Arnold Monto d’Ann Arbor aux Etats-Unis.

Déclarations d’intérêts. L’OMS a également mis en ligne les déclarations d’intérêts concernant 6 membres de ce Comité d’urgence. Parmi ces déclarations, figure celle du Pr Arnold Monto, déjà cité en juin dernier dans une enquête publiée dans le British Medical Journal (BMJ). Il a déclaré des activités de « conseil » auprès de laboratoires pharmaceutiques (GSK, Novartis, Roche, Baxter, Sanofi) pour une rémunération inférieure, à chaque fois, à 10 000 dollars américains (soit 7614 euros).

L’OMS qui s’est toujours défendue avec virulence sur ce point (« à aucun moment les intérêts commerciaux n’interviennent dans ma prise de décision », rappelait le Dr Chan en juin dernier) assure que les déclarations d’intérêts mentionnées « n’étaient pas de nature à exclure les membres en question du Comité d’urgence ».

« Notre décision de ne pas rendre ces noms publics était motivée par la volonté de protéger ces experts d’influences commerciales ou autres », n’a cessé de répéter la Directrice générale de l’OMS. Mais la préservation de l’anonymat de ce groupe a surtout alimenté les soupçons de connivences commerciales. Ce manque de transparence a notamment été dénoncé par le BMJ donc mais aussi par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) et même récemment en France, dans le rapport de la commission d’enquête sur le rôle des firmes pharmaceutiques du sénateur François Autain (CRC). « L’exemple le plus manifeste du manque de transparence est l’anonymat des membres du Comité d’urgence », y est-il noté. Lequel anonymat a « soulevé de nombreuses interrogations tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’OMS »…

  • Source : OMS, 11 août 2010 – Interview du Pr Bruno Lina, 11 août 2010 – Rapport de la Commission d’enquête sur le rôle des firmes pharmaceutiques, août 2010.

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