L’homéopathie: 6 Français sur 10 y croient…

25 octobre 2003
Pratique médicale fondée par l’Allemand Samuel Hahnemann (1755-1843), l’homéopathie est dans le collimateur du gouvernement. Pourtant, six Français sur dix affirment y croire. Ce qui n’a pas empêché le ministre de la Santé, Jean-François Mattei, de réduire le taux de remboursement des médicaments homéopathiques de 65% à 35%. Or précisément, la seconde vague de l’Observatoire Europrisms Santé réalisée par A+A et Destination Santé s’est penchée sur les rapports des Français avec l’homéopathie. Une pratique dont les tenants paraissent se distinguer par une démarche santé au sens global du terme, proche d’un engagement idéologique. L’homéopathie, c’est avant tout une affaire de femmes. Près de deux sur trois y croient. A l’inverse, les hommes paraissent plus méfiants. Seulement quatre sur dix se disent sensibles à cette pratique. En fait comme l’explique Serge Andrieu, responsable de ce travail chez A+A, il se dégage trois types de Français : les pratiquants (26%), les bienveillants (32%) et enfin les résistants (41% ). L’homéopathie, un style de vie Le recours à l’homéopathe – et à la panoplie des médicaments hahnemanniens - s’inscrit en fait dans une attitude générale « hygiéniste ». C’est un véritable style de vie ! Plus que les autres, les pratiquants considèrent (43%) que l’hygiène de vie est la garantie d’une bonne santé. Ils n’hésitent pas ainsi, à chercher les bonnes informations. Deux sur trois s’affirment attentifs aux actualités diffusées dans les médias santé. Qui dit bonne hygiène de vie, dit pratique régulière d’un sport. Là encore les pratiquants se distinguent. Ils sont 28% à faire de l’exercice physique, contre seulement 14% des résistants ! Les bienveillants quant à eux, ne sont pas pour autant totalement sédentaires, puisqu’un sur cinq affirme se dépenser physiquement. Pour ceux qui consomment des médicaments homéopathiques, la santé c’est aussi avoir un regard éclairé sur l’aliment, son origine, sa péremption (78%). Cependant, il est un point sur lequel tout le monde se retrouve sur un pied d’égalité, c’est le grignotage. A croire que cette pratique, considérée comme en bonne partie responsable du développement de l’obésité dans nos sociétés, est littéralement entrée dans nos mœurs. L’envie de grignoter n’épargne personne puisque pratiquement un Français sur cinq s’y adonne. Et cela quels que soient ses comportements de santé par ailleurs. Une hygiène de vie quasi parfaite Pourtant, et c’est déjà un paradoxe, les Français qui font confiance à l’homéopathie veillent particulièrement à leur équilibre alimentaire. Hormis donc, ce satané grignotage dont ils ne peuvent s’affranchir ! Par rapport aux bienveillants et aux résistants, les pratiquants consomment ainsi moins de viandes rouges, de charcuterie, de pâtes ou de riz. Et davantage de fruits, de légumes et de poissons. Naturellement, et c’est cohérent par rapport à leur démarche hygiéniste, ils boivent surtout de l’eau et des jus de fruit. Ce qui ne les empêche pas de boire aussi de l’alcool. Mais moins que leurs compatriotes. Un sur trois affirme boire « très rarement », et seulement 10% des homéopratiquants estiment être des buveurs réguliers ; ils sont 20% parmi les bienveillants et 17% pour les résistants. Autre caractère distinctif : les adeptes de l’homéopathie se démarquent par leur vigilance accrue en matière de sécurité alimentaire. Près de 40% d’entre eux vérifient la composition ou la provenance des aliments. S’ils ne le faisaient pas, ils estimeraient prendre un vrai risque pour leur santé ! Quant aux Français qui refusent l’homéopathie, ils paraissent prêter moins d’attention à leur santé, notamment en matière de prévention. Près de la moitié (44%) ne font pas attention à l’équilibre des repas par exemple, contre seulement 32% des pratiquants. Le pharmacien, un allié de choix Parce qu’un nombre important de médicaments homéopathiques se délivre sans ordonnance, le pharmacien paraît le meilleur allié de leurs partisans. Parmi ceux qui croient à l’homéopathie, ils sont ainsi 42% à se rendre rarement chez le médecin, parce qu’ils préfèrent demander conseil à leur pharmacien. Ils estiment en fait pouvoir se soigner seuls. Et ils pratiquent l’automédication. Pas de surprise donc : près d’un tiers attendent la dernière minute pour aller voir un médecin. S’ils ne consultent pas dès les premiers symptômes ils tiennent tout de même à se soigner, mais à leur façon. Une incohérence est frappante. Le refus de la vaccination par une majorité d’homéopratiquants paraît en effet s’inscrire en contradiction flagrante avec leur attitude hygiéniste et préventive. La vaccination constitue pourtant le seul moyen aujourd’hui, pour prévenir des maladies graves, voire mortelles : grippe, hépatite B, diphtérie, varicelle, poliomyélite, méningite C… Un déremboursement dans l’air du temps ? Les médicaments homéopathiques ont été sacrifiés sur l’autel du fameux Service Médical Rendu (SMR). Pure logique d’ailleurs, puisque les études réalisées sur l’efficacité de ces derniers sont extrêmement rares. Il y a eu moins de 30 essais selon des normes acceptables en France, et seulement 90 dans le monde toutes langues confondues. C’est bien peu pour forger une science ! Et quand ils sont évalués selon les normes requises, les médicaments homéopathiques révèlent, bien trop souvent, leur inefficacité. Tout juste sont-ils équivalents à l’effet placebo, comme l’a démontré une récente étude sur l’asthme allergique. Alors oui, sur un plan strictement scientifique le déremboursement paraît amplement justifié. Cependant, d’après les résultats de l’Observatoire Europrisms Santé, cette décision s’inscrit en faux par rapport aux attentes d’une catégorie particulière de la population française. Comme le souligne Serge Andrieu, « ceux qui font confiance à l’homéopathie anticipent la maladie. Ils ont un style de vie qui les prépare à un vieillissement en bonne santé. Leur credo ? La prévention. "Baisser le taux de remboursement de ces médicaments, c’est donc en quelque sorte pénaliser des gens qui ont une consommation très modérée de médicaments. Et c’est les orienter vers les médicaments qui coûtent plus cher". Alors oui, le déremboursement infligé à cette catégorie de médicaments est dans l’air du temps. Il sanctionne une attitude générale de refus d’évaluation par les tenants de cette forme singulière de pharmacie. Ce refus va-t-il perdurer ? Dans ce cas il y aurait péril, car à l’évidence l’avenir de l’homéopathie s’il doit exister, passera inéluctablement sous les fourches caudines de l’évaluation scientifique. Ne serait-ce qu’en raison des exigences des conventions européennes. Mais par sa brutalité, cette décision sanctionne les Français qui sont les meilleurs candidats à une bonne santé. Elle s’apparente au geste du tireur maladroit qui se tire dans le pied… Découvrez en détail les résultats d'Europrisms Santé.
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