La bataille du sel est relancée

21 octobre 2010

Enfin ! La France dispose d’un groupe d’experts chargé d’envisager les moyens de réduire l’utilisation du chlorure de sodium pour saler notre alimentation. Le groupe SALT – pour Sodium Alimentaire Limitons les Taux -, rassemble des cardiologues, des endocrinologues, des chercheurs et des industriels. Le Pr Eric Bruckert dirige le service d’endocrinologie de la Pitié-Salpêtrière, à Paris. Vice-président de SALT, il nous en a expliqué les principales missions.

« Nous allons promouvoir toutes les actions permettant de diminuer raisonnablement la quantité de sel consommé. C’est un objectif qui sur le plan de la santé publique, est capital pour réduire la prévalence de l’hypertension artérielle ». Selon un travail américain récemment publié dans le New England Journal of Medicine, « le fait de diminuer de 3 grammes (par jour) la consommation de sel des Américains permettrait d’éviter chaque année entre 60 000 et 100 000 infarctus du myocarde. Mais également de diminuer de 37 000 à 60 000 selon le cas, le nombre des hémiplégies par accident vasculaire cérébral (AVC) ». Un impact considérable…

Or malgré une consommation qui tend à diminuer légèrement, le chlorure de sodium est encore bien trop présent dans les assiettes des Français. Certains d’entre eux en absorbent deux à trois fois plus que la recommandation officielle de l’OMS, limitée à 6 grammes/jour. En pratique, comment faire pour réduire ces apports en sodium ? « Pratiquement 80% du sel consommé provient d’aliments transformés, et seulement 10% de la salière elle-même », explique le Pr Bruckert. Ces dernières années, il semble que les industriels aient consenti de réels efforts. « Dans les charcuteries, il y a eu une diminution de la quantité de sel, dans les soupes également. Et surtout les artisans boulangers ont fait un effort particulier. Le plus intéressant, c’est que les consommateurs ne s’en sont pas aperçus ». Pas suffisant toutefois, pour réellement inverser la tendance.

L’incroyable exemple finlandais…

Voilà pourquoi les experts de SALT vont informer « sur les aspects pratiques qui aideront le public à diminuer sa consommation de produits sodés. Parmi les pistes de réflexions intéressantes, il y a la promotion de tout ce qui peut être un substitut au goût salé. L’adjonction de poivre et d’épices par exemple, permet de limiter l’utilisation de la salière ». L’objectif est aussi de sensibiliser la population sur les produits les plus salés comme « les fromages, la charcuterie et le pain ». Enfin les experts, tout en travaillant aux côtés des industriels, proposeront la réalisation d’études sur l’impact éventuel en santé publique, d’une réduction de la consommation.

Ils pourront s’appuyer pour cela, sur l’exemple finlandais. En 1979, la consommation moyenne de sodium dans ce pays s’établissait à 12 grammes/jour et par personne. Soit le double de la quantité recommandée par l’OMS. Au cours des années 1980, un programme de sensibilisation a été mis en place, les industriels étant invités à réduire la teneur en sodium de leurs produits. En 1993, une législation a imposé un étiquetage signalant les aliments riches et pauvres en sodium. Et dès 2002, la consommation moyenne était descendue en dessous de 9 grammes/jour. C’est encore trop, mais ce premier résultat s’est accompagné d’une baisse de 80% de la mortalité par AVC et infarctus du myocarde. C.Q.F.D.

  • Source : Interview du Pr Eric Bruckert, 19 octobre 2010

Aller à la barre d’outils