Qu’est-ce qui fait vraiment l’efficacité d’un médicament ?

16 janvier 2009

Il n’est pas normal que des malades soient privés en France, de traitements capables d’améliorer leurs conditions de vie alors qu’ils sont accessibles chez nos voisins.

C’est pourtant le cas semble-t-il, dans un grand nombre de domaines. « Dans la majorité des pathologies les plus fréquentes » soulignent les responsables du Cercle de Réflexion de l’Industrie pharmaceutique (CRIP), « l’efficacité à court terme est déjà obtenue par les médicaments actuellement existants. Le véritable enjeu de la recherche, c’est d’améliorer des bénéfices secondaires mais néanmoins importants. Cet enjeu fondamental n’est pourtant plus pris en considération par les autorités de santé (françaises) dans leur évaluation des nouveaux médicaments. »

Qui sont ces malades ? Des hypertendus, dont 50% abandonnent leur traitement au bout d’un an à cause de ses effets secondaires. Ils courent ainsi un risque considérable d’accident vasculaire cérébral. Des millions d’insomniaques sont réduits à « se faire dormir » à coups d’hypnotiques entraînant une dépendance, des troubles de la mémoire ou de la vigilance durant la journée. Les parkinsoniens sont également très affectés par cette situation. Efficaces à court terme, les traitements actuels apportent un soulagement partiel, irrégulier ou assorti d’effets secondaires délétères : hallucinations, comportements de jeu compulsif… Asthme, douleur, incontinence urinaire, diabète… les exemples sont légion.

Aujourd’hui explique l’économiste Claude Le Pen (Université Paris-Dauphine), le seul critère de fixation des prix de remboursement reconnu en France est celui de l’efficacité clinique. « C’est certainement un effet induit du grand mouvement en faveur de l’Evidence Based Medicine (EBM), qui dans les années 1990 entendait fonder toute la médecine sur les preuves. » Des preuves quantitatives, ne prenant en compte ni la qualité de vie des patients, ni la praticité du traitement et son impact sur l’observance… donc sur les résultats.

Présidente du CRIP qui regroupe 17 laboratoires français et européens représentant près de 13% du marché, Marie-Laure Pochon appelle « à ce que la tolérance, la sécurité, la simplicité de prise, l’observance des nouveaux traitements soient également pris en compte, évalués et reconnus par les pouvoirs publics. » Et naturellement, « que ces traitements se voient accorder le prix des médicaments de référence (sur le marché depuis 15 ou 20 ans parfois, n.d.l.r.) augmenté du taux d’inflation » Toutes les informations existent et sont disponibles. « Elles figurent dans tous les dossiers d’AMM soumis dans le cadre des procédures européennes harmonisées. Les autorités françaises en ont donc connaissance. »

En attendant ce changement, les malades n’ont d’autre ressource que de supporter des thérapeutiques affectées de graves inconvénients ou de se les procurer – à leurs frais – dans un autre pays de l’Union. Des dizaines de milliers de parkinsoniens par exemple, pourraient voir leur vie transformée. Comme le soulignait le Pr Philippe Damier, chef de service de Neurologie au CHU de Nantes, « trois médicaments existent pour ce faire. Ils sont remboursés dans 23 pays d’Europe, mais pas en France. » Ceux qui peuvent se les offrir hors des frontières doivent en assumer les frais : environ 100 euros par mois et par malade. Nous reviendrons prochainement, sur cet important sujet qui touche à la justice sociale.

  • Source : Déjeuner-débat du CRIP, Paris, 16 janvier 2009

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