Quand la maladie n’est pas seule…

14 décembre 2011

Chez les patients bipolaires, les spécialistes doivent aussi prendre en compte ce qu’ils appellent des troubles associés, ou encore des comorbidités. Or les troubles anxieux, les addictions à l’alcool ou aux substances psychoactives, la prise de poids excessive augmentent la sévérité de la maladie.

Cette affection, qui touche en France plus de 600 000 personnes, est caractérisée par une alternance de phases dépressives et de phases maniaques. « Entre les épisodes, le patient est considéré comme indemne de tout trouble psychiatrique majeur », nous explique le Pr Chantal Henry, psychiatre à l’hôpital Albert Chenevier (Groupement hospitalier Henri Mondor de Créteil). Or ce n’est pas le cas. « En dehors de ces phases, il peut souffrir de ce que nous appelons des troubles associés ».

Par ailleurs, plus la prise en charge aura été tardive, plus les risques de complications seront importants. « Parmi ces troubles, il y a des troubles psychiatriques, dont les plus fréquents sont représentés par les addictions au sens très large du terme, notamment avec l’alcool et le cannabis. Mais il y a également les troubles anxieux et les troubles du comportement alimentaire. Les patients présentent beaucoup plus de comorbidités somatiques (c’est-à-dire de maladies organiques, n.d.l.r.). La majorité voit augmenter ses facteurs de risque cardiovasculaires. Ils ont davantage de problème de diabète de type 2, d’hypertension artérielle, d’excès de cholestérol… »

Une espérance de vie plus réduite

Pour atténuer ou supprimer leurs symptômes hypomaniaques, de nombreux patients fument du cannabis. De toutes les maladies mentales le trouble bipolaire est le plus corrélé aux abus de substances. Pour le Pr Chantal Henry, le patient bipolaire est également, davantage exposé aux risques évoqués plus haut. « De nombreuses études ont montré qu’au-delà des facteurs qui pourraient être expliqués par le fait qu’ils fument plus ou boivent plus, les malades souffrent davantage de pathologies somatiques que la population générale. Et cela n’a rien à voir avec leur hygiène de vie : problèmes articulaires, migraines, maladies cardiovasculaires. Cela concourt à réduire de 10 ans l’espérance de vie des patients bipolaires, hors suicide. »

Enfin la sévérité des troubles associés va dépendre aussi, du moment où le malade sera diagnostiqué. Et donc pris en charge. « Plus on laisse évoluer la pathologie sans traitement, plus on risque de voir ces troubles se dégrader ». Chez les bipolaires, le risque de maladies cardiovasculaires est multiplié par deux en comparaison avec la population générale. « Nous avons constaté que l’incidence de l’obésité était plus élevée chez ces malades. Elle s’établit à 16% alors que l’incidence moyenne en France est de 10%. C’est pourquoi il est également nécessaire de se préoccuper des troubles associés », conclut le Pr ChantalHenry.

  • Source : Interview de Chantal Henry, 5 novembre 2011 - Comment bien vivre avec des troubles bipolaires du Dr Ronald R. Friere, Editions Flammarion 332 pages, 22 euros

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